Avec Hipster, Dacia parie sur la frugalité de la voiture électrique
Face à l’inflation des prix, de la taille et des équipements, un concept remet les pendules à l’heure
Pendant que l’industrie automobile s’engouffre dans une course effrénée vers toujours plus de technologies, d’écrans tactiles, d’assistances à la conduite et de gabarits imposants, Dacia vient de dévoiler un concept qui détonne. Son nom ? Hipster. Son ambition ? Rappeler qu’une voiture peut rester un simple outil de déplacement, sans artifices superflus ni dimensions démesurées. Loin des promesses habituelles de disruption, ce projet pose une question simple mais dérangeante : avons-nous vraiment besoin de tout cet équipement et de ces volumes XXL pour aller du point A au point B ?
Quand le prix moyen d’une voiture devient inaccessible
Les chiffres sont là, implacables. Le prix moyen des voitures neuves en Europe a bondi de 77 % entre 2010 et 2024. Ce qui coûtait 15 000 euros il y a vingt ans flirte désormais avec les 30 000 euros, voire bien plus pour les modèles électriques. Cette inflation ne tombe pas du ciel : elle résulte d’une accumulation de normes de sécurité, de systèmes électroniques et d’équipements devenus obligatoires ou quasi-incontournables. S’ajoute à cela une tendance de fond vers des véhicules toujours plus imposants, les citadines d’hier affichant désormais les dimensions des berlines compactes d’antan.
Dacia pointe du doigt un paradoxe préoccupant. Selon la marque, le poids moyen des véhicules a augmenté de 15 % en raison de ces équipements obligatoires. Pour compenser cette surcharge, la puissance des moteurs a grimpé de 43 %. Résultat final : une hausse du coût de production de 63 %. Un cercle vicieux dont le consommateur paie la facture finale, creusant un fossé grandissant avec le pouvoir d’achat des ménages.
Le concept Hipster : un pari sur l’essentiel
Dévoilé début octobre 2025, le Dacia Hipster n’est pas encore une voiture de série. C’est un concept, une proposition, presque une provocation adressée à l’industrie et aux régulateurs européens. Romain Gauvin, responsable du Design Avancé chez Dacia, ne cache pas ses ambitions : « C’est le projet le plus “Dacia” sur lequel j’ai travaillé. Un projet qui a la même portée sociétale que la Logan il y a 20 ans. »
Avec ses trois mètres de long, ses trois portes et son design cubique assumé, ce véhicule ne cherche pas à séduire par des lignes racées. Il mise tout sur l’utilité pratique. Quatre personnes peuvent y prendre place. Le coffre offre 70 litres avec la banquette arrière en place, ou 500 litres une fois celle-ci rabattue. Des chiffres qui surpassent nombre de citadines actuelles, prouvant qu’on peut faire polyvalent sans faire gros.
La vitesse maximale ? 80 km/h. L’autonomie ? 150 kilomètres, soit environ une semaine de trajets quotidiens moyens avec deux recharges hebdomadaires. Un dimensionnement qui peut sembler étriqué, mais qui correspond à une réalité : en France, 94 % des automobilistes parcourent moins de 40 kilomètres par jour. Pourquoi, dès lors, imposer des batteries surdimensionnées qui alourdissent la facture et l’empreinte écologique ?
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Une bataille réglementaire à mener
Si le Hipster reste à l’état de concept, ce n’est pas par manque de volonté de Dacia. C’est parce que la réglementation européenne actuelle ne permet pas de commercialiser un tel véhicule à un prix vraiment accessible. Pour respecter toutes les normes de sécurité active obligatoires, il faudrait ajouter des équipements qui feraient inexorablement grimper le coût final.
Frank Marotte, directeur des ventes et du marketing de Dacia, l’exprime sans détour : l’industrie et les régulateurs commencent à reconnaître qu’on est allé trop loin pour les petites voitures. Les réglementations pensées pour des berlines familiales s’appliquent de la même manière à des véhicules urbains dont l’usage est fondamentalement différent. L’utilisation réelle par les clients est complètement déconnectée des dernières réglementations en matière de sécurité active.
L’objectif : un prix sous les 15 000 euros
Dacia ne cache pas ses ambitions tarifaires. La marque vise un prix de commercialisation inférieur à 15 000 euros pour la version finale du Hipster, prévue en 2027. Un positionnement qui le placerait bien en dessous de la future génération de Dacia Spring, annoncée à moins de 18 000 euros. Pour comparaison, le Mobilize Duo de Renault démarre à 9 990 euros, mais avec un gabarit encore plus réduit et seulement deux places.
Ce positionnement tarifaire n’est pas qu’un argument marketing. Il correspond à une réalité économique et sociale : une part croissante de la population se trouve exclue du marché automobile neuf. Entre les ménages modestes, les jeunes actifs et les retraités aux revenus limités, le besoin d’une mobilité abordable n’a jamais été aussi pressant. Ces deux années d’ici 2027 seront nécessaires pour voir la situation évoluer côté régulation et pour permettre aux ingénieurs de passer du concept au modèle définitif.
Minimalisme assumé : du low-tech intelligent
À l’intérieur du Hipster, pas d’écran multimédia dernier cri ni de tableau de bord numérique sophistiqué. Juste un combiné d’instrumentation indiquant l’essentiel : la vitesse. Pour la navigation, la solution est pragmatique : utilisez votre smartphone. Dacia mise sur le principe du BYOD (Bring Your Own Device), évitant ainsi l’installation coûteuse d’écrans tactiles dédiés et de systèmes électroniques propriétaires.
Cette approche minimaliste peut sembler régressive aux yeux de certains. Elle mérite pourtant qu’on s’y attarde. En déléguant certaines fonctions au smartphone que chacun possède déjà, Dacia évite une duplication de coûts et mise sur une technologie que l’utilisateur maîtrise. Le smartphone sert à la fois d’écran de navigation et de clé digitale, tandis qu’une enceinte Bluetooth nomade assure la fonction audio.
Le système YouClip : la personnalisation à la carte
Onze points d’ancrage YouClip sont répartis sur la planche de bord, les panneaux de porte et le coffre. Ce système d’attache, déjà présent sur le Duster de troisième génération, permet de fixer différents accessoires dans l’habitacle : porte-gobelet, accoudoir, plafonnier, lampe, support pour smartphone ou tablette, porte-manteau. La modularité transforme le minimalisme initial en personnalisation progressive, selon les moyens et les envies de chacun.
Cette logique évite d’imposer à tous des équipements standardisés et coûteux. Chaque propriétaire ajoute uniquement ce dont il a réellement besoin. Une philosophie qui s’inscrit dans une démarche de sobriété choisie plutôt que de privation subie.
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L’obsession du poids comme levier écologique
Le véritable coup de maître du Hipster réside dans sa masse contenue. Avec 800 kilos batterie comprise, il affiche 20 % de moins que la Dacia Spring, déjà réputée pour sa légèreté. Cette performance découle d’une philosophie baptisée « éco-smart » par le constructeur : moins de matière première nécessaire, moins d’énergie pour la fabrication, moins de masse à déplacer donc moins de consommation électrique.
Dacia affiche une ambition claire : diviser par deux l’empreinte carbone des véhicules électriques actuels. Un objectif qui passe par une réduction drastique des matériaux utilisés et une optimisation de chaque composant. Les protections latérales utilisent un matériau partiellement issu du recyclage développé en interne. La carrosserie se limite à une seule couleur teintée dans la masse et seulement trois pièces peintes.
Un design pensé pour la simplicité de production
L’apparence du Hipster ne laisse personne indifférent. Romain Gauvin détaille la philosophie esthétique du projet : « Notre ambition en réinventant la vraie voiture populaire était de lui offrir un design évident et mémorisable. Une voiture qu’on peut dessiner en trois coups de crayon. »
Les roues sont positionnées aux quatre coins, l’absence totale de porte-à-faux optimise l’espace intérieur. Les sangles remplacent les poignées de porte traditionnelles, les feux arrière sont intégrés derrière la vitre du hayon pour éviter de multiplier les composants. Les sièges avant fusionnent en une banquette unique avec une armature visible, les appuie-têtes sont ajourés, les vitres latérales coulissent plutôt que de s’abaisser électriquement. Chaque choix répond à une logique d’optimisation économique et environnementale.
Stéphanie Chiron, responsable Produit Avancé chez Dacia, souligne l’exploit d’aménagement réalisé : « Dacia Hipster Concept, c’est tout ce que l’on attend d’un véhicule du quotidien, dans seulement 3 m de long, 1,53 m de haut et 1,55 m de large : 4 vraies places et un coffre modulable de 70 à 500 litres. » La densité d’aménagement constitue en elle-même un défi technique : offrir un espace habitable comparable à celui d’une citadine traditionnelle dans un format qui se rapproche d’une voiturette sans permis.
Une question sociétale plus qu’automobile
Au-delà des aspects techniques, le concept Hipster soulève des interrogations plus profondes sur notre rapport à l’automobile. Dans des sociétés où la voiture reste chargée de symboles statutaires, les automobilistes européens sont-ils prêts à accepter un tel niveau de simplicité ? La réponse dépendra sans doute moins des discours écologiques que du pouvoir d’achat réel des ménages.
Si le prix catalogue se révèle effectivement attractif, le Hipster pourrait bien trouver son public parmi ceux qui considèrent la voiture comme un simple outil de déplacement, sans affect particulier. Pour les trajets domicile-travail, les courses de proximité, les déplacements urbains et périurbains, ce type de véhicule couvre l’essentiel des besoins réels.
Repenser la mobilité électrique
La démarche de Dacia interroge également sur la trajectoire prise par l’industrie automobile dans son ensemble. Alors que la réglementation environnementale pousse les constructeurs vers le tout électrique, le poids moyen des véhicules continue paradoxalement d’augmenter, entraînant une inflation des prix et une hausse des besoins en matières premières critiques. L’extraction du lithium, du cobalt et des terres rares nécessaires aux batteries surdimensionnées pose des questions environnementales et éthiques que l’industrie peine à résoudre.
En remettant de la sobriété au centre de sa proposition, Dacia pose indirectement une question inconfortable : et si la vraie voiture verte de demain ressemblait moins à un SUV électrique premium qu’à ce concept de trois mètres sur roues ? La course à l’autonomie maximale, où chaque constructeur rivalise pour offrir des centaines de kilomètres que la majorité des utilisateurs n’exploiteront jamais pleinement, a-t-elle vraiment un sens écologique et économique ?
Un pari sur l’avenir de la mobilité accessible
Le Dacia Hipster ne sera peut-être jamais commercialisé sous cette forme exacte. Mais son existence même constitue un signal important. Elle rappelle que d’autres voies sont possibles, que la mobilité électrique peut s’envisager autrement que par l’accumulation de technologies et la surenchère d’équipements. Pour les territoires ruraux et les zones de moyenne montagne, où les distances restent modestes mais où les transports en commun font défaut, ce type de véhicule pourrait répondre à un besoin réel.
La frugalité n’est pas une punition. C’est un choix rationnel face aux contraintes économiques et environnementales actuelles. Le concept Hipster propose une forme de décroissance choisie de l’automobile : faire moins, mais mieux. Moins de technologies superflues, moins de poids, moins de coûts, mais une mobilité qui reste accessible au plus grand nombre.
L’accueil réservé à ce concept par le public et les institutions dans les mois qui viennent dira beaucoup de notre capacité collective à accepter de nouvelles formes de sobriété. Entre le discours écologique officiel et les habitudes de consommation réelles, l’écart reste souvent béant. Le Hipster met cette contradiction en lumière. Reste à savoir si nous saurons y répondre autrement que par des bonnes intentions.
Rendez-vous en 2027 pour savoir si cette vision d’une automobile plus frugale saura trouver sa place sur nos routes. D’ici là, le débat est ouvert sur ce que doit être la voiture de demain : un concentré de technologies ou un simple moyen de transport efficient ?
Article publié sur Melles750.fr – Magazine en ligne autour des Pyrénées et des modes de vie écoresponsables