On s’en Melles avec Yoann Ducuing Trailer et Pyrénéiste.
[On s’en Melles] pour rencontrer celles et ceux qui font vivre les Pyrénées Haut-Garonnaises. Des questions Pêle-Melles pour prendre de la hauteur, avec l’authenticité et la sincérité de notre territoire.
Pour ce nouvel épisode de [On s’en Melles] c’est Yoann Ducuing, coureur de Trail et Pyrénéiste
Bonjour Yoann, quel Pyrénéen êtes-vous ?
Bonjour, j’ai 43 ans et j’habite dans le Comminges, au pied des premiers sommets des Pyrénées. Je pratique le trail et je touche de plus en plus à l’alpinisme (classique ou hivernal). Mon terrain de jeu favori reste la haute-montagne. J’aime quand c’est rocheux, rugueux, austère, technique. Pour moi la montagne, c’est le berceau du monde minéral. J’ai toujours été attiré par la montagne et en particulier les Pyrénées. Depuis tout petit, je regardais le Pic du Midi de Bigorre depuis chez mes grands-parents et je me demandais déjà s’il était possible d’y grimper. Alors quand j’ai su qu’il y avait des installations techniques dessus, ça m’a fasciné.
Aujourd’hui, je suis un amoureux des Pyrénées, un pyrénéiste, qui aime à découvrir toujours plus de nouveaux sommets. D’ailleurs, je fais rarement plusieurs fois le même endroit, même si certains sont fabuleux, car j’ai toujours envie d’explorer de nouveaux territoires. Ce que je recherche dans ma pratique montagnarde, ce sont les ascensions, les sommets.
J’aime cette manière dont la montagne nous autorise à fouler ses cimes pour y découvrir des vues extraordinaires. J’aime le chemin semé d’embuches pour y parvenir ou pour parfois buter pour mieux revenir. Tout comme j’aime cette récompense de tous les efforts consentis, une fois parvenu à l’objectif. Enfin j’aime cet ensemble d’émotions que l’on peut ressentir sur une session en montagne, ce sentiment de plénitude et de communion avec la montagne.
Je me nourris des récits légendaires de Russell, Béraldi, Ramond, des frères Cordier ou encore de Ledormeur et j’en passe. J’ai un petit faible pour les crêtes ludiques, aériennes, en bon rocher, où il faut poser les mains, escalader. J’aime évoluer sur le fil de l’arête.
Chaque sortie en montagne me sert également d’entrainement pour le trail, sport que je pratique aujourd’hui sur des distances ultra. Ce qui est un privilège immense selon moi car cela signifie que mes entrainements sont automatiquement associés à la notion de plaisir. Ce qui n’est pas forcément le cas pour tout le monde.
Enfin, pour terminer mon portrait de pyrénéen, je dirai que j’ai une pratique très individuelle de la montagne, presque individualiste puisque je fais la plupart de mes ascensions en solo (ce qui n’est pas très recommandé, je l’accorde volontiers mais l’expérience accumulée permet de jauger au mieux les prises de risque). Individualiste mais paradoxalement avec l’envie de partager au plus grand nombre. J’essaie d’être, à mon très modeste niveau, un ambassadeur des Pyrénées en valorisant autant que je peux leur patrimoine, leur histoire mais aussi la manière de les respecter (environnement, métiers de la montagne, faune…).
Dans les Pyrénées Haut-Garonnaises, on a toujours le regard pointé vers les sommets. Vers quels sommets voulez-vous aller ?
Pour ne rien vous cacher, évidemment que ce sont les « 3000 » qui m’attirent le plus. C’est le graal des Pyrénées et de tout pyrénéen. L’Himalaya a ses « 8000 », les Alpes ses « 4000 ». Nous, ce sont les 212 « 3000 » qui composent la chaine. Mais je suis le premier à reconnaitre qu’il n’y a pas de petits ou grands sommets. Je peux finalement autant m’éclater aux Spijeoles qu’au Burat, je peux prendre autant de plaisir au Perdiguère qu’au Pic Saillant. La vue depuis le Sauvegarde est unique, notamment sur tout le massif de la Maladeta. La modeste crête du Pic du Lion est un superbe terrain de jeu et j’adore la parcourir avec ma chienne border-collie. Mais si vous me demandez quels sommets me font rêver en Haute-Garonne, je vais évidemment me tourner vers le Luchonnais avec des noms mythiques comme les Gourgs Blancs, le Grand Quayrat ou encore le Lézat.
Sur un plan sportif, les Pyrénées haut-garonnaises ne sont pas en manque de belles compétitions de trail même si le programme de ma saison prochaine ne devrait pas passer par la Haute-Garonne. J’ai une pensée pour le Luchon Aneto Trail, le Marathon du Mourtis que j’ai eu l’opportunité de courir ou encore le Trail du Cagire. Il y a encore de très beaux challenges proposés dans le coin.
J’aimerais enfin m’initier aux ascensions de couloir (neige, glace, mixte). Si je parviens à trouver un peu de temps et un bon guide, ce sera peut-être un de mes prochains projets.
On sait aussi que les nuages d’altitudes finissent toujours par se dissiper. Mais en attendant quelles sont les difficultés ou les contraintes pour mener à bien vos projets ?
J’ai l’habitude de m’adapter et d’adapter mes objectifs et mes envies à un contexte bien souvent mouvant: météo, conditions du terrain (avalanches…), covid (confinement, interdiction de voyager…). Au final, ma principale contrainte serait de réussir à conjuguer vies professionnelle, personnelle, familiale et sportive. C’est à dire bâtir un agenda avec un juste équilibre, sans qu’une activité puisse se faire au détriment d’une autre. C’est pas toujours simple mais c’est largement facilité avec le soutien de ma compagne ou de ma fille. Evidemment que j’aurais envie de toujours plus explorer ou grimper dans les Pyrénées, en France ou ailleurs. Mais on ne peut pas tout faire et la pratique de la montagne apprend la patience et l’humilité. Les sommets ne bougeront pas, ils seront toujours là dans quelques années.
Quelle est votre dernière ballade, randonnée, activité, … dans les Pyrénées Haut-Garonnaise ?
Pas plus tard que le WE dernier au Maupas. J’étais parti depuis la vallée du Lys pour faire l’ascension du Pic du Maupas en mode léger (alpi/trail). J’ai buté en haut de la tusse du Maupas quand j’ai vu qu’il restait des belles plaques de neiges dures et de gel sur la crête finale qui mène au Pic. Ça aurait été certainement possible mais plus du tout dans le timing que je m’étais fixé. Mais ce n’est pas grave, le renoncement est une vertu montagnarde et la Tusse du Maupas constitue déjà à la fois un magnifique bélvédère et une belle sortie sportive.
Les vues sur les prestigieux voisins comme le Quayrat, le Lézat, les Crabioules et le Pic de Boum sont uniques. Et puis j’adore les couleurs, les contrastes et la luminosité des journées d’automne. L’atmosphère est hyper claire et on distingue parfairement les crêtes ariégeoises (Maubermé, Valier…).
Et comme la montagne, c’est la liberté avant tout, j’adapte ma sortie. Je vais faire une pause sur la Tusse de Prat Long pour me restaurer avant de redescendre. Le panorama y est très beau. On voit les installations de Superbagnères qui brillent au soleil. On aperçoit les falaises abruptes du Pic Saillant. Je prends le temps de regarder tous les sommets. Je me dis que je n’ai encore jamais fait le Céciré et il serait bien que j’y aille faire un tour très bientôt. Encore une idée de sortie en Haute-Garonne!
Notre territoire est fort de sa nature. Si vous étiez un animal des Pyrénées, vous seriez une truite, un ours, un chevreuil, un chien de berger, un oiseau, …. ?
Sans aucune hésitation un isard. Cet animal me fascine. C’est lui véritablement le roi de la montagne. Son aisance sur tous les terrains même les plus raides, les plus croulants, les plus dangereux voire les plus improbables est tout simplement remarquable. Quand on le voit gravir une paroi, il se dégage une facilité et une légèreté déconcertantes. Il est presque aérien dans ses déplacements. Alors, bien évidemment je suis à des années-lumière de ses capacités. C’est pourquoi, oui j’aimerais bien être un isard!
Et puis quand on parcourt activement les Pyrénées, il nous arrive d’en rencontrer assez régulièrement. Et c’est à chaque fois un moment magique de les rencontrer, en petits comités ou en hordes avec les petits et de les voir trottiner, sauter ou galoper. On entend le bruit des pierres qu’ils font sauter sous leur pas et qui résonnent dans le silence. Parfois le temps s’arrête et on croise leur regard si par chance ils ne sont pas trop loin. Donc oui sans hésiter un isard.