Divagations pour un territoire de montagne en transition dans un monde d’après affranchi des frontières et des limites territoriales. La pandémie démontre que le bout du monde n’existe plus pour nos activités professionnelles. On découvre ainsi de nouvelles possibilités pour des territoires qui ne pouvaient plus attirer de zones d’activités.
Désertification inexorable de nos territoires entre vallées et montagnes
Dans nos vallées Pyrénéennes, et même en adossant la locomotive (d’un train à hydrogène bien sûr) de la Haute-Garonne, la tendance était fortement à la désertification du territoire. Le départ de plusieurs sites industriels s’étaient suivi d’une baisse de la population, entrainant avec elle, l’étiolement des services locaux. Avec comme toujours dans ces cas là, le cercle infernal, pas de services, pas de population, pas de population, pas de services, … Et l’exode toujours …
Bien sûr, il reste l’attrait touristique de nos montagnes jusqu’alors tiré par l’activité hivernale autour du ski et des sports d’hiver. Mais entre temps, le réchauffement climatique est venu modifier la donne. Et de toute façon les attentes des touristes et des amateurs de montagne, ont aussi évolué.
Alors, l’ambiance est plutôt morose, partagée entre immobilisme et volonté de transformer, …
Mais pour autant les opportunités sont bien là, à condition de s’en emparer très rapidement.
Les espaces de travail sans limites de temps et d’espace
C’est une des révélations de la pandémie, les verrous d’un monde du travail conservateur dans ses pratiques, ont sauté. En matière d’organisation du travail, les innovations managériales réservées aux seules startups, s’installent dans toutes les entreprises. Des entreprises artisanales, aux organismes familiales, en passant par les collectivités, et les grands groupes, … l’organisation du travail a été transformé avec la crise sanitaire. Même si tout le monde ne peut pas télétravailler, c’est malgré tout tous les métiers qui bougent dans la gestion du temps.
Mais c’est incontestablement les grandes entreprises, qui sont en train d’accélérer leur transformation et les impacts ne sont pas neutres.
Ces grandes entreprises, qui se pensaient à l’abri de toute crise, sont aujourd’hui ébranlées. Le télétravail souvent rejeté par le passé, est presque devenu la norme quand il est possible. Et même quand les employés sont sur site, tout a changé. On est sur place, mais comme il faut limiter les contacts et les rassemblements, même les réunions sont virtuelles. Chacun reste dans son bureau.
En même temps, les entreprises cherchent à gagner en agilité, n’hésitant plus à vendre des locaux devenus de simples lieux de passage. Ainsi ce qui est venu de l’urgence sanitaire, pourrait bien devenir la norme de demain avec des organisations hybrides entre télétravail à domicile, en coworking ou tiers-lieux, et l’entreprise.
L’hybridation du monde du travail est le levier de développement de nos territoires
Le format hybride des emplois de service, est sûrement la meilleure des opportunités pour les territoires ruraux. L’expérience du télétravail contraint, a aussi révélé les limites, en terme d’espaces pour certains, d’accès à des réseaux ou de cloisonnement entre vie familiale et professionnelle : « Quelqu’un peut vider le lave-vaisselle ? … Je suis en réunion« .
Alors pour les espaces et le cadre de vie, nos territoires peuvent fournir sans limite. Les biens immobiliers à la vente sont nombreux, dans, au milieu et autour de nos villages. Les prix de l’immobilier en zones rurales sont pour le moins attractifs.
Alors que pendant des années, la question était d’arriver à localiser des entreprises sur nos territoires, pour faire revenir la population. C’est désormais la population qui peut revenir en trainant dans son sillage son propre emploi. Et c’est sans parler des travailleurs indépendants et freelance.
Une hybridation qui pourrait satisfaire à bien des niveaux : moins de trafic routier autour des grandes agglomérations, moins de temps de trajet, organisation plus agile pour les entreprises, sobriété pour tous …
Pendant les différents confinements, on a beaucoup entendu parler de l’exode des habitants des grandes villes en quête d’une vie meilleure. Et si ces grandes ambitions de changement de vie, sont pour beaucoup restaient veines, il n’en demeure pas moins que l’envie est là. Elle sera sûrement encore plus présente, pour une nouvelle génération.
Et l’hybridation pourrait à minima permettre à une partie de la population de nos vallées et de nos montagnes de rester vivre sur le territoire.
Rien ne vaut les retours d’expériences de ceux qui pratiquent déjà
Souvent toutes les mauvaises raisons sont bonnes à prendre, pour ne rien faire. Pour le télétravail ? On n’a pas la fibre ! … que nenni …
Et ce n’est pas Francis qui dira le contraire. Employé dans une grande entreprise Toulousaine où le télétravail n’était pas possible (par principe), voit aujourd’hui son quotidien agréablement boulversé. Même lui, était dans la vie d’avant assez perplexe sur le télétravail, mais il mesure aujourd’hui les bénéfices pour lui, sa famille et son employeur.
C’est depuis un village de montagne qu’il partage désormais sa vie avec son appartement Toulousain, et son emploi dans la métropole.
Il explique qu’avant le confinement, une importante migration informatique était nécessaire dans son entreprise avec des enjeux transatlantiques. Une migration à plusieurs centaines de milliers d’euros pour permettre les différents déplacements, les réunions sur site, … Mais finalement cette migration a été effectuée avec des équipes en télétravail, d’autres sur place, sans les déplacements, et pour un coût final de quelques dizaines de milliers d’euros ?
Qui a dit que tout était compliqué ? Pourquoi faire simple ?
Francis n’a pas la fibre dans son petit chalet, mais une bonne connexion 4G. Et finalement, une migration informatique transatlantique en 4G est plus simple que de trouver certains services et produits de base sur le territoire.
Et donc comment le territoire peut lui aussi faire sa migration ?
Elle ne viendra pas toute seule la migration, mais on ne peut pas non plus la planifier.
Par contre, on peut l’organiser et surtout la facilité par de petites initiatives. D’abord le territoire doit gagner en visibilité. Les atouts sont là, les difficultés aussi, mais on ne doit pas attendre et surtout espérer gommer les difficultés pour communiquer sur les atouts. Car il ne faut pas sous-estimer les capacités de transformation de celles et ceux qui viendront sur le territoire.
Ces néo-ruraux, ces néo-travailleurs, désormais partagés entre des vies professionnelles en agglomération, et vie quotidienne dans nos villages, vont amener leurs lots de réponses aux difficultés d’aujourd’hui. Il faudra juste être à l’écoute et en capacité d’accepter d’accompagner au lieu de légiférer via des plans transversaux, …
Et pour accompagner, personne n’attend que ne soit déployée une base de la NASA sur ce territoire à explorer, … Il n’y a pas besoin d’attendre l’obstacle d’après comme la fibre optique.
C’est l’agilité et la réactivité qui doivent primer, comme en ouvrant des espaces de coworking dispachés sur le territoire, en jouant même l’interconnexion avec Transgarona, pour miser sur la vertus des déplacements verts.
Demain un séjour à la montagne peut s’organiser entre un week-end au ski, et une réunion à distance depuis un coworking le lundi matin, pour échapper au trafic du périphérique (qui s’en trouve lui même allégé).
Voilà pour les divagations qui peuvent amener nos territoires ruraux et de montagnes à amorcer leur transition pour transformer le quotidien du monde d’après.