(Last Updated On: 2 octobre 2022)

La sécurité alimentaire de Melles se met à table pour la Fête de la Montagne à Saint-Béat-Lez autour du maire Alban Dubois. Malgré une météo pluvieuse, et finalement heureuse pour nos montagnes, l’ambiance était studieuse sur le stand du village de Melles à la Fête de la Montagne. Au menu de cette fin de journée, du samedi 24 septembre, une table ronde autour de la sécurité alimentaire de Melles, désormais primordiale pour le petit village de montagne. Question de sémantique, l’autonomie alimentaire s’efface un temps pour viser la sécurité alimentaire. Et autour cette ambition, quasi nécessaire face aux enjeux du dérèglement climatique et du contexte international, Alban Dubois, et l’équipe municipale multiplient les initiatives et mobilisent les réseaux pour parvenir à cet objectif. Certes la sécurité alimentaire pousse sur les terres plus ou moins pentues du village, mais elle s’accompagne aussi de l’expertise des scientifiques.



Melles laboratoire de la sécurité alimentaire dans les Pyrénées

Qui dit sciences, dit laboratoire, et désormais les scientifiques en géographie, en agronomie, en agriculture, … parlent volontiers de laboratoire du vivant. La science sort des laboratoires pour nourrir les initiatives de terrains, et se nourrir des expériences locales. C’est bien ainsi que fonctionne un écosystème vivant.

Après un rapide tour de table autour d’Alban Dubois (maire de Melles), de Philippe Terrancle (directeur du Parc Naturel Régional Comminges-Barousse-Pyrénées), de Simon Dessaivre (maraîcher engagé et porteur de projet sur Melles), Thierry Cazedebat (consultant, enseignant, agronome, et paysan) présente les conditions objectives et nécessaires pour mener à bien à projet de sécurité alimentaire.



Du plan Marshall, de la déterritorialisation, de la spécialisation des territoires, de l’industrialisation de l’agriculture, … Thierry Cazedebat tend à expliquer les différents évènements qui ont conduit des territoires ruraux à devenir des territoires abandonnés et pilotés à distances par les pouvoirs publics et politiques. De ce constat, et dans un contexte nouveau, de dérèglement climatique, d’effondrement de certains pans de la société de consommation, et de mobilisation d’écocitoyens engagés pour s’émanciper des emprises et des lobbying politico-industriels, des territoires abandonnés reprennent en main leur destiné.

Et Melles en est un bon exemple avec il y a encore 100 ans, un village autonome, quasi autarcique, autour d’un millier d’habitants exploitants de manière responsable les ressources, les contraintes et les opportunités de la montagne. Un millier d’habitants qui se nourrissaient des fruits et légumes produits sur place à flanc de montagne, de leur élevage lui aussi nourrit des récoltes locales, tout en composant avec les conditions météorologiques, les ressources en eau, les difficultés des terrains, et les prédations.



Mais un siècle plus tard, biberonnés au pétrole et aux produits industriels de l’agroalimentaires, nos territoires se sont vidés de leur population en abandonnant les pratiques de bon sens d’une agriculture et d’une alimentation paysanne. Où comment passer de pommes de terre cultivées et consommées dans nos montagnes, à une purée industrielle en poudre ou des frites de pommes de terre reconstituées suremballées, produites à l’autre bout du monde et vendues en supermarché ?

C’est dans ce contexte que l’initiative de renouer avec une forme d’autonomie alimentaire, et surtout de sécurité alimentaire, nourrit des initiatives municipales et citoyennes à Melles. Surtout que désormais l’autonomie alimentaire rime avec aussi avec les enjeux du dérèglement climatique et de conflits mondialisés, avec à la fois la question de la souveraineté alimentaire, de la sobriété (heureuse pour nous), mais aussi de la sécheresse et des risques majeurs d’incendies. Alban Dubois rappelle d’ailleurs que « un incendie sur les terres et les forêts de Melles ne s’arrêterait que faute de combustibles …« .



La convivialité dans nos villages

Car c’est bien la désertification, la déprise agricole, et désormais le réchauffement climatique, qui exposent nos montagnes au risque majeur d’incendies géants. Et finalement de la lutte contre les incendies à la sécurité alimentaire, en passant par l’agropastoralisme, la culture, et la vie tout simplement, il n’y a qu’un pas qu’Alban Dubois compte bien enjamber. Pour renouer avec une alimentation locale, et donc reprendre la main sur des terres en friches, difficiles d’accès, colonisées par les fougères, il faut REcréer une dynamique positive autour de la culture sous toutes ses formes.

Et le maire tient à rapeller que toutes ces initiatives pour construire des cabanes pastorales dignes pour les bergers ou un poulailler municipal partagé ne se réalisent qu’autour de la convivialité. « Le matin en fait tourner la tronçonneuse, et à midi on tourne autour du barbecue« . Des moments de convivialité et de solidarité que nos anciens savaient vivre pleinement, y compris lorsqu’il fallait monter à 2000 mètres pour festoyer avec les voisins Ariégeois.



Opportunités et contraintes de la sécurité alimentaire à Melles

La table ronde s’ouvre ensuite vers le public autour des opportunités et des contraintes pour un village comme Melles de renouer avec la sécurité alimentaire. Les questions et les propositions fusent autour de la pente des terrains, de l’irrigation, des ressources humaines, de l’emprise envahissante de la fougère, de la prédation des cervidés, de la présence de l’ours, et in fine des débouchés locaux pour une alimentation locale. C’est le moment où les habitants du village et du territoire, devront finalement choisir entre la frite industrielle McCain et la pomme de terre du village.



Des réflexions qui devraient alimenter Simon Dessaivre dans sa réflexion d’une installation maraichère à Melles. Lui qui, depuis plusieurs années, passe et tourne de parcelles en parcelles sans jamais pouvoir s’installer réellement. Cette précarité foncière, il en fait une force pour améliorer ses pratiques d’agroécologie. Peut-être trouvera-t-il à Melles les conditions d’une installation pérenne ?

Nul doute qu’après cette table ronde, les idées et les initiatives vont continuer de grimper à Melles, fougères ou pas fougères.